Cinéma

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Arts des nouveaux médias. Préparation du séminaire du 11 mai 2010. Anne Zeitz

Texte

« Je voudrais suggérer ici une autre manière d’avancer vers une nouvelle économie des relations de pouvoir, qui soit à la fois plus empirique, plus directement reliée à notre situation présente, et qui implique davantage de rapports entre la théorie et la pratique. Ce nouveau mode d’investigation consiste à prendre les formes de résistance aux différents types de pouvoir comme point de départ. Ou, pour utiliser une autre métaphore, il consiste à utiliser cette résistance comme un catalyseur chimique qui permet de mettre en évidence les relations de pouvoir, de voir où elles s’inscrivent, de découvrir leurs points d’application et les méthodes qu’elles utilisent. Plutôt que d’analyser le pouvoir du point de vue de sa rationalité interne, il s’agit d’analyser les relations du pouvoir à travers l’affrontement des stratégies. »
Michel Foucault, « Le sujet et le pouvoir », in Dits et écrits II, Paris, Gallimard, 2001

Films


The Conversation
, Francis Ford Coppola, 1974


Enemy of the State
, Tony Scott, 1998

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Photographié depuis un siège de la salle du Reflet Médicis, un plan de Nocturnes pour le roi de Rome, film de Jean-Charles Fitoussi, 2006, distribué par Point-ligne-plan.

Une opinion spontanée, constamment contredite, est que l’arrivée et l’emploi de nouveaux médias dans les arts seraient synonymes d’une perte de l’investissement sensible et personnel. Les machines numériques ont certes de telles capacités d’automatisme qu’elles semblent devoir démultiplier les productions standard du décervelage de masse. La distance historique est pourtant là pour démontrer la validité et la nouveauté créatrice des arts fondés sur les dispositifs automatiques que sont la photographie et le cinéma, la radio, l’enregistrement sonore, etc. La nouveauté des technologies et des instruments, qui est d’abord celle de la culture qui les porte, n’a-t-elle pas aussi cette primitivité par laquelle les arts se trouvent stimulés ? Alors, si ce film est primitif, c’est au sens, comme en mathématiques, de l’intégration des fonctions qui n’en seraient que les dérivées, propriétés et variations à quoi on reconnaît d’habitude le cinéma .

Lorsque Jean-Charles Fitoussi découvre, en 2005, la caméra fort particulière qu’est le téléphone, il y voit peut-être la caméra-stylo où le cinéma-œil dont a rêvé le cinéma, mais aussi, de façon pratique, le moyen de noter des sons et des images lors de repérages. Lui qui a été dix années durant l’assistant de Jean-Marie Straub et Danièle Huillet, va transgresser ses choix et ses propres contraintes stylistiques. Séjournant à Rome, le hasard le conduit à faire, avec ce téléphone-caméra, un long plan de 26 minutes du « ballet » des serveurs dans une réception à la Villa Médicis, une séquence qu’aucune autre technique n’aurait pu saisir. Il constate que ce plan « tient sa durée » et qu’il ouvre la perspective d’un film à part entière. En outre, la projection sur grand écran de cette vidéo à la résolution dérisoire est une révélation : les « défauts » y sont « transmués en merveilles ».

Ainsi, faire un film sera cette fois pour lui une entreprise à la table de travail (devant l’ordinateur), un travail au jour le jour d’agencement d’images-matériaux, de construction littéraire et musicale. La composition peut en être sans cesse reprise et modifiée. L’échéance d’une sortie nationale (la première a eu lieu mercredi 6 janvier 2010 au cinéma Reflet Médicis à Paris) a probablement fixé les 67 minutes de ce film de fiction : Nocturnes pour le roi de Rome. C’est un film d’une beauté inconnue.

À lire :
Un texte sur le film par le philosophe Clément Rosset.

Le compte-rendu de la conférence de Jean-Charles Fitoussi à l’Observatoire des nouveaux médias, Ensad, 17 décembre 2008.

« Le film téléphonique comme shifter », un texte de Jean-Louis Boissier à propos du Pocket Film Festival, sur ce site AdNM, le 16 juin 2008.

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Arts des nouveaux médias. Préparation du séminaire du 12 janvier 2010. Julien Levesque

Discussion

L’Invention de Morel, machine à enregistrer et à reproduire des personnages simulacres du vivant, est une métaphore littéraire du désir et du besoin qu’éprouvent les humains à représenter et recréer leur monde ou du moins à en conserver l’illusion. Aujourd’hui, les mondes virtuels deviennent lieu de « tournage » où notre moi-avatar joue les acteurs et réalisateurs d’un nouveau genre. L’enregistrement de ces séquences conduit à nous questionner sur l’existence d’un cinéma du virtuel.

Références


Diary of a Camper
, machinima de Rangers Clan (United Ranger Films), 1996.


My Trip to Liberty City, machinima de Jim Munroe, 2003.


Watch the World, machinima de Robbie Dingo, 2007.


Avatar, film de James Cameron, 2009.

Deux articles d’AdNM :

« Retour sur l’Invention de Morel », http://www.arpla.fr/canal20/adnm/?p=683
«Masaki Fujihata : poétique de la carte, du panorama et du miroir (virtuels) », http://www.arpla.fr/canal20/adnm/?p=279

Sur Avatar et le cinéma en relief :

« Le dernier des blogs », blog de Jean-Noël Lafargue, 27 décembre 2009.
« En quête de sciences », Blog du Monde, 10 janiver 2010.

Livre, films :


Adolfo Bioy Casares, L’invention de Morel, 1940, éditions 10/18, 2004, 3,80 €.


James Cameron, Avatar, 2009.


L’Année dernière à Marienbad, 1961, Delphine Seyrig, Giorgio Albertazzi.

Suppléments proposés par Jean-Louis Boissier :
On se reportera aussi à : Alain Resnais et Alain Robbe-Grillet, L’Année dernière à Marienbad (1961); ainsi qu’à : Luc Courchesne, Portrait numéro 1, installation vidéo-interactive, 1990.

L’Année dernière à Marienbad, Bande annonce du film à sa sortie. (doc. The Criterion Collection)
Extraits du texte de la bande-annonce de L’Année dernière à Marienbad :
… que c’est-il vraiment passé l’année dernière ? Voici les questions auxquelles vous, spectateur, aurez à répondre. […] Pour la première fois au cinéma, vous serez le co-auteur d’un film, à partir des images que vous verrez, vous créerez vous-même l’histoire, d’après votre sensibilité, votre caractère, votre humeur, votre vie passée. C’est à vous qu’il appartiendra de décider si cette image, ou celle-là, représente la vérité ou le mensonge, si cette image est réelle ou imaginaire, si cette image figure le présent ou le passé, tous les éléments vous seront donnés, à vous de conclure. […]
venez JOUER le VRAI JEU de la VÉRITÉ
venez GOÛTER…
cette sensation NOUVELLE
MIEUX qu’avec le CINÉMA en RELIEF
MIEUX qu’avec le GRAND ÉCRAN
VOUS SEREZ
VOUS-MÊME
le CENTRE
… de cette histoire d’AMOUR comme vous n’en avez encore JAMAIS VU…
… mais comme vous en avez peut-être VÉCU…


L’Année dernière à Marienbad, Delphine Seyrig dans le rôle de A.


Luc Courchesne, Portrait numéro 1, 1990. (© Luc Courchesne)

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Actualité
Du 7 au 31 janvier 2010 au palais de Tokyo, le Module présente Marion Tampon-Lajariette, Caméra 1, Plan 8, 2008


Caméra 1, Plan 8, 2008. Vidéo d’animation 3D, 12 mn en boucle.

Le film est une animation en images 3D figurant une mer au large vue d’en haut, selon un mouvement complexe de travellings et de panoramiques. Dans la bande son, on reconnaît une musique hitchcockienne et la voix de James Stewart dans La Corde (1948). On sait que ce film d’Hitchcock est réputé n’être qu’un long plan séquence. S’il présente bien sûr des raccords masqués, sa caractéristique n’en est pas moins que le temps du film renvoie au temps égal d’une scène dramatique continue. Adapté d’une pièce de théâtre, le film se situe dans une unique pièce dont les vastes fenêtres donnent sur la ville à la tombée de la nuit. Un crime a eu lieu dans un moment qui précède le film et c’est vers la fin du film que James Stewart va comprendre et révéler comment il a eu lieu. La caméra se porte alors vers le décor sans personnages pour désigner le modus operandi du meurtre. Marion Tampon-Lajariette a noté avec précision l’enchaînement du mouvement de la caméra porté par ce récit et c’est cette même variation très fluide mais déterminée, non aléatoire, qu’elle applique à la caméra virtuelle qui « filme » la mer de synthèse. Le point de vue, inaccessible, improbable autrement qu’en pensée, qu’est l’immensité répétitive et hors champ de l’océan, donne à éprouver le mouvement dans sa plus grande pureté abstraite et énigmatique tout en réveillant le souvenir d’un film et de son moment le plus explicitement virtuel d’« image-relation », d’un tissage dont il ne reste plus que la chaîne sans rien qui se trame. *

*Deleuze, Cinéma I. L’Image-Mouvement, Minuit, pp. 270-271 : « La Corde est fait d’un seul plan pour autant que les images ne sont que les méandres d’un seul et même raisonnement. La raison en est simple : dans les films d’Hitchcock, une action, étant donnée (au présent, au futur, au passé), va être littéralement entourée par un ensemble de relations, qui en font varier le sujet, la nature, le but, etc. […] C’est cette chaîne des relations qui constitue l’image mentale, par opposition à la trame des actions, perceptions et affections. »


photo JLB, 7 janvier 2010, Palais de Tokyo, Paris.

Marion Tampon-Lajariette a donné une conférence le 9 décembre 2009 dans le cadre de l’Observatoire des nouveaux médias. L’intégralité de l’enregistrement est consultable sur le site OdNM.

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