DETRUIRE...

A l’heure de l’information toute-puissante, le pouvoir des images est au centre de tous les débats. Certains codes et certains sujets de l’information ont une autorité très ancrée dans l’inconscient collectif. L’image comme expression de la réalité, croyance ancienne détrônée par la connaissance approfondie des techniques qui lui sont propres, ou bien toujours d’actualité ? Les images dans ce domaine reposent encore sur des principes d’objectivité et d’omniscience, pour beaucoup d’entre nous, et ce malgré la révolution du numérique et l’accroissement des possibilités données par la retouche, qu’elle a entraînée. Cette remise en cause aboutit à un questionnement plus large sur le principe de « vérité des images ».
Les images que je souhaite créer décriront un pays en état de crise ; les éléments de notre quotidien seront captés et détournés afin de témoigner d’un climat de destruction. En effet, il s’agit d’un volet important de l’information, par lequel les consciences peuvent être habilement manipulées : sans même parler de retouche d’images de guerre, le simple choix d’en produire et d’en montrer, ou de ne pas le faire, est une façon d’aiguiller l’information. Certains conflits subsistent en ce moment même, et ne font pas partie de « notre » actualité pour la simple raison qu’on ne nous les montre pas.
Avec pour matière des scènes d’apparence banales, il s’agira de modeler un climat d’affrontement ou de peur. Rien ne mettra directement en scène le combat, car il s’agit de s’appuyer sur des scènes réelles bien plus que sur des mises en scène, la substance du reportage sera plutôt composée d’images suggestives, que nous avons également beaucoup l’habitude de côtoyer dans le registre du reportage de guerre.

Hélène Canaud