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Hikaru Fujii, artiste : Conférence du 27 octobre 2004 à Paris 8 |
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Préambule à "Design illimité des corps inachevés" |
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Tao > invention d'un "outil". |
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02 Un "outil", originairement, est fabriqué dans un but pratique, conçu pour lutilisateur. Cet objet, simplement utile, na pourtant pas de place dans notre société de consommation, il nexiste pas réellement. Son caractère simplement utile, désormais utopique, sest effondré. Il ne reste quun "produit", qui sest développé selon les calculs du marketing. Le produit" qui arrive jusquà nous na pas dun concepteur de forme. Il ny a plus d'"auteur" de cet objet. Il nest plus possible de connaître l'"idée" originelle de la forme du produit, lidée directive, lessence fonctionnelle. Lessence est obscure pour lutilisateur. Il nest plus possible de déterminer à qui incomber la "responsabilité" formelle du produit. Au fond, la logique de production confine à la création de formes insaisissables, à la fois diffuses et confuses (Tokyo, porte automatique). Mais, ce qui est certain, le produit touche notre désir et les attire: parce que nous sommes stratégiquement "modélisés" par le marketing afin de devenir le "consommateur". Consommateur, au premier sens, simple, de celui qui, activement, consomme, désire et achète. La modernité qui liée, à la révolution industrielle appelait au devenir industriel. Au jour daujourdhui, le devenir industriel est terminé: nous sommes industrialisés, mis en série, modélisés. Alors, lartiste vit dans ce monde "industriel" et travaille avec le produit industriel. Il travaille sur une forme hyper complexe de produit intitulé "Software". Il en joue, ou sen sert, lutilise: le produit est là, désormais nécessaire? Outil / Utilisateur > Produit / Consommateur ____________________________________________ |
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L'histoire de Max Msp |
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03 [Présentation de projet Plis] Max est né à lIRCAM, qui est un lieu de linvention de l'"outil" informatique pour la musique, le scientifique, lingénieur et lartiste procédaient de façon stratégique au montage de nouveaux mécanismes destinés au service dun problème spécifique de leur expérience esthétique. Le nouveau mécanisme est nécessaire, utile à la réalisation du " concept " de lartiste. Il est nécessaire de franchir la limite de leur " technique existante " afin de réaliser leur " nouvelle " expérience esthétique. Les nouvelles fonctions est donc des résultats de leurs nouvelles expériences. Max est apparu en tant que nouvelles fonctions, nouvel alphabet. Un alphabet qui permette lui aussi de penser la musique de manière nouvelle. Max est né à lIRCAM en 1986, en collaboration avec léditeur Patcher. Max a été conçu par Miller Puckette pour la réalisation pour Philippe Manoury de Pluto. Pour ce projet, Max a fourni le traitement MIDI (1) afin de contrôler le processeur numérique en temps réel 4X (2). Trois ans plus tard, avec léditeur OPCODE, David Zicarelli a repris leur développement et a réalisé la première génération darchitecture de Max. Il a adapté le traitement en temps réel MIDI et linterface graphique (sur laquelle nous reviendrons). En 1995, la version Max 3.0 est apparue. Il est dès lors devenu possible de contrôler limage vidéo (QuickTime). En 1997, Max sest fait connaître grâce à la deuxième génération présentée chez léditeur " CYCLING74 " sous le nom de Max Msp. Celle-ci adapte alors une nouvelle architecture DSP (3) avec laquelle il est possible de produire le son indépendamment du fonctionnement MIDI et dautres appareils externes. Ce nouveau fonctionnement DSP était déjà utilisé dans dautres environnements par exemple PD (4). Lintérêt était de pouvoir utiliser ces fonctions tout en restant au sein de lenvironnement Max. ______________________________ |
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04 Produit industriel > Amélioration |
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04 Depuis 1999, les nombreuses fonctions de traitement de limage ont été développées sur Max Msp, tout comme nato (5) et SoftVNS 2 (6), utilisés jusquà aujourdhui dans divers domaines comme lart dinstallation, la danse et le théâtre. En 2001, la nouvelle version Max4.0 Msp2.0 a introduit de nombreuses améliorations, et notamment la nouvelle possibilité de programmation basée sur son script originel. Cette nouvelle forme de programmation lui permet détendre son fonctionnement, fonctionnement possible, au demeurant, au moyen du langage C. En 2002, sous le nom de Jitter, le nouvel environnement de programmation conçu pour limage vidéo sest stabilisé. Depuis 2004, Max Msp Jitter version 4.5 permet de faire de la programmation avec les langages Javascript et Java. Il y a donc une histoire de Max et par là-même, une "évolution". ______________________________ Cette évolution est une extension de sa capacité. Le programme Max Msp Jitter a sans cesse été "mis à jour" afin de sadapter aux formes désirées par les artistes. Autrement dit, ce logiciel a "mémorisé" les gestes, les constructions des artistes. Les expériences des artistes ont été "conservées" dans la mémoire de ce logiciel. Le logiciel dispose de leur mémoire. Cest par eux quil sest construit, amélioré, développé, en fonction de leurs désirs et de leurs besoins. Max Msp ne fait pas cependant simple figure de dépôt. "On nhérite pas dun stock" disait Jacques Derrida. Un objet nest jamais constitué dun ensemble brut. Max est une banque de données. Il a été interprété, filtré, mis en ordre. Le logiciel est un "héritag ". Il implique des actes de décision, de réponse, et donc de sélection, de choix. Il agit comme nous, notre mémoire. Ce produit est une synthèse de la mémoire technique des artistes. Max est le produit dune accumulation sur 20 ans denviron 450 fonctions sonores (que lon appelle "objects") et de 140 fonctions/objects visuels. Si lon commence à prendre en compte la partie extensible du logiciel, il devient possible de dépasser les 1000 fonctions/objects possibles. Dailleurs, si lon compte aussi les "modules" diffusés sur Internet que les musiciens et les plasticiens ont laissés libre de décider du type de "combinaison" ou "mélange" des objects quil veut mettre en oeuvre, les fonctions sonores et visuelles atteignent un chiffre colossal. De plus, avec Max, il est possible dajouter des fonctions informatiquement identiques depuis dautres logiciels, de type Final Cut Pro, After Effects, Photoshop, 3D studio Max, Illustrator, Pro Tools, Peak, Macromedia Director, qui mémorisent également les techniques spécifiques des artistes. Les techniques sont mémorisées et accumulées dans le corps de ce produit, ce qui permet de mettre à la "disposition" de lartiste une très grande "variété" des techniques de création sonore et visuelle. Mais, la mémoire conservée, sa qualité elle-même, pose la question véritable du développement de l'"expérience esthétique". Avec un produit comme Max, lexpérience "avant garde" du scientifique, de lingénieur et de lartiste semblent disparaître: lartiste rentre dans le comportement de "choisir" et de "modifier" les options proposées. Ce quon appelle, la "personnalisation", étant comme la tendance actuelle de divers produits industrialisés. La "personnalisatio " créé une forme de liberté, mais avec des paramètres précis, presque paradoxalement "bloqués". La forme donnée par lartiste soumise au "conditionnement" esthétique de la technique proposée. Le résultat d'oeuvre: on reconnaît souvent lesthétique de "Max", on reconnaît davantage la texture et la méthode du logiciel que la petite signature de lartiste. >>>> doc Max OverView |
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05 Doù vient cette tendance technique de "personnalisation" |
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05 Depuis toujours, la science informatique liée au marketing a consciemment cherché un maximum d'efficacité, de satisfaction et de bien-être dans le processus dutilisation de linterface, de manière à ladapter à "tous" les utilisateurs. Cette démarche a poussé la recherche à mieux connaître la ressource du système humain en "groupe", ce que lon nomme "ergonomie" étant considéré comme le principal outil permettant de définir les standards d'utilisation de linterface "désirante". Lenvironnement de lordinateur est devenu "pulsionnel". Lun des produits les plus novateurs de lergonomie est la prolongation de plusieurs paramètres dordre physiologiques, cognitifs, psychologiques, sémiologique et sociologiques : cest le système "GUI (graphical user interface)". (7) Lenvironnement de Max Msp Jitter saffiche en mode GUI, cest-à-dire en forme de "synthèse dimage", comme cest le cas pour les fenêtres, les icônes, le menu et le dispositif de pointage (8) de lécran sur lesquels lutilisateur peut agir avec les périphériques dentrée comme la souris. Sur le mode de GUI, la réalisation de luvre devient possible en "temps réel". Avec le système GUI, lartiste peut construire son uvre en la modifiant. Linteraction entre lartiste et son support devient temporellement possible dans un rapport en "direct". La vitesse absolue de linteraction "immédiate". Lenvironnement de GUI permet de faciliter la jonction de plusieurs mécanismes de manière non uniforme. Avec les éléments graphiques dans lesquels tel type de mécanisme de contrôle est "déjà" mémorisé, on peut disposer facilement de plusieurs fonctions en "même temps". Ainsi la "modification" et la "projection" sont réalisables en "même temps". Autrement, dans lenvironnement GUI, tous les graphiques reflètent des mécanismes de contrôle. Lélément graphique que lutilisateur agit nest donc quun paradigme technologique, avec une fonction qui lui est propre. Linteraction immédiate à travers linterface graphique sinscrit donc sur un mode dinteraction "réversible" au sein de laquelle la "venue" est prévisible et calculable. Via GUI, on ne peut attendre, il ny a pas dévénement. Parce quil y a un horizon dattente, une anticipation, une prévision, une programmation. Lévénement est celui quon ne peut pas atteindre, celui qui se forme dans labsence dun horizon dattente. Le système GUI ne permet pas cette absence. Linterface graphique sur laquelle lartiste agit doit toujours répondre au "même" effet que lartiste attend. Cet effet ne doit pas être "inattendu". Dans un environnement GUI, il ny a pas dévénement, sa qualité seule constitue la création: pas de surprise, mais des conséquences nettes résultant de choix précis. (Cest la même chose pour le logiciel Signwave Auto-Illustrator reprogrammé Adobe Illustrator, à travers lequel lutilisateur ne peut pas contrôler ce quil désire. Lutilisateur est encore dans un horizon dattente.) Ainsi, il doit "protéger" sa qualité pour ne pas être transformé. Il doit "sécuriser" son identité Lenvironnement GUI doit être un monde sécurisé. Cest un monde (un mode) dans lequel il ny a pas dautre risque que la venue programmée. Linterface Max Msp Jitter "assure" à lutilisateur un monde sécurisé. Des conséquences nettes résultant de choix précis. Cette "prémisse" déclenche une "déstabilisation" du comportement chez lutilisateur. Lutilisation devient dès lors "pulsionnelle". Lutilisateur exécute des fonctions avant quil ne prenne conscience des mécanismes du logiciel, ce que disait Gilles Deleuze en rapport avec le "corps" prostitué: "non plus ce que ça veut dire, mais comment ça marche, comment ça fonctionne. Comme si le désir ne voudrait rien dire, mais était un agencement de petites machines, machines désirantes...". Lutilisateur apprend la nouvelle fonction en prenant connaissance de linterface graphique. Ce fonctionnalisme devient idiomatique. Il découvre sans cesse de nouvelles différences. Sa carte géographique sétend jusquà la limite de ce monde sécurisé. Mais sil reste sur le mode GUI, il ne peut plus percevoir sa limite. Dans un environnement GUI, il est informatiquement impossible de contrecarrer le principe du système. Au sein du monde sécurisé, il ny a pas dinteraction irréversible. Le système reste toujours sa " condition originaire ". Le comportement de lutilisateur nest quun mode de variation autour dune base inébranlable. Il ne peut que " personnaliser " le paramètre conditionné. |
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06 SDK (Software Development kit) |
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06 Mais le véritable problème, cest qu'avec cette "machine désirante", on serait en droit dattendre de la nouveauté, et non pas un monde inébranlable, une esthétique limitée, sécurisée. Lartiste "attend" la venue de la nouvelle technique, il la guette, il conceptualise et réalise son ouuvre sous la condition technique à venir. Le progrès de la science ergonomique provoque une distanciation de l'utilisateur envers le mécanisme réel de l'ordinateur. La division spécialiste/non-spécialiste est neutralisée au sein de la société industrialisée, et lartiste travaille désormais sur un mode "corrélatif". En rapport avec une multitude de mémoires qui se construisent ensemble. Nous avons vu que le programme Max est une banque de données de techniques héritées. Nombre dexpériences esthétiques y ont été mémorisées par une technologie darchivage numérique. Dautre part, nous avons vu que le progrès de toute forme de science conduit à une simplification de son langage originel afin de pouvoir ladapter à la collectivité, cest-à-dire au marketing. Par conséquent, lattente des nouvelles techniques devient idiomatique. Dans le flux de technique accumulé, la part singulière des artistes se confond, se mélange. Avec Max, la " synthèse " de ces techniques héritées devient une activité artistique centrale. La notion de " remix " a pris un rôle majeur pour lutilisateur de cet outil informatique. Le problème est que ces techniques mémorisées sont "anonymes". Il ny a pas dauteur, ni de contexte historique de ces "écritures" informatique (après la sélection et la filtration cultuelles de éditeur CYCLING74); on les a simplement sauvegardées comme des fonctions "mécaniques" en les classifiant par ordre alphabétique. Le programme Max Msp Jitter est un espace "commode" et "rangé" en apparence, mais en fait, il sorganise en une forme d"entropie". Avec Max Msp Jitter, lutilisateur se sert de fonction mécanique, alors que la fonction mécanique na pas pu défendre son identité artistique. La technologie de larchivage na pas sauvegardé la "propriété intellectuelle" de la fonction mécanique de Max. Par conséquent, elle est ignorée. Pourtant, la fonction mécanique autrement dit le programme est un "système" informatique de production sonore et visuel "particulier" (singulier) sur lequel lartiste peut modifier les paramètres afin de le "personnaliser". La fonction mécanique est une machine de "production" de "singuliers", qui les produit "singulièrement". Comme lappareil photographique, le phonographe, le cinématographe, il a sa propre " fonction " qui entre en rapport avec le "processus organique dans la mesure où il contribue au maintien de lorganisme", cest ce que Bertalanffy appelle le "système". Par la production de son système propre, le produit est organisé "singulièrement". Réciproquement, on peut dire aussi que lactivité de discernement et que linterprétation humaine sont "différemment" organisées selon les différents systèmes de production, cest ce que Walter Benjamin nous a montré à propos du cinéma. Mais aujourdhui, le processus de production de lobjet sonore et visuel ne peut plus être "standardisé". La recherche scientifique nous conduit vers un monde nettement plus "instable". Lartiste sculpte lui-même son système de production. |
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07 Projet : "Circonstance" et conclusion |
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