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Résumé de la conférence en texte, en quicktimes et en images réalisés par Pascal LEGRAND , Khanynda KENYA, Abde NACIN
............................LE SITE
a) L'espace contre le lieu. Citant l'article de Jean Pierre VERNANT concernant la pensée archaïque, Anne CAUQUELIN rappelle que durant l'Antiquité, pour se développer la démocratie grecque doit lutter contre le lieu sacré des petits rois. Elle doit abolir la magie de la profondeur liée au lieu. De ce conflit naîtra l'espace euclidien, sans profondeur, découpable, géométrisable. Les lieux deviendront mesurables, partageables. La justice pourra faire son entrée dans l'espace démocratique. Mais l'espace ne chassera pas le lieu ; chacun s'installera dans les strates de la pensée.
b) L'alliance du perspect et du prospect : l'invention du paysage.
La renaissance qui, au travers de la perspective, invente le paysage; annonce-t-elle aussi le site ? Là aussi deux concepts sont à définir: s'appuyant sur PLINE LE JEUNE, Anne CAUQUELIN définit le prospect comme le lointain, étendue illimitée et continue où se perd le regard. Quant au perspect proche de la perception, il détaille, énumère, fragmente, construit et met en perspective. Il a donc fallu attendre les Annonciations de la Renaissance pour que le prospect s'incarne dans le perspect. Ce sera la révélation du paysage.
c) Les site : contraire de lui-même et alliance avec l'ailleurs.
Mais dans ce paysage de l'Annonciation, union de perspect et du prospect vient se joindre à l'horizon un monticule sur lequel se trouve une forteresse, marque de la discontinuité du perspect dans le continium du paysage. Elle semble nier le paysage qu'elle domine. Elle brise l'étendue de notre vue, elle nous regarde par le biais d'une hypothétique présence. Ce site ne vient-il pas nous rappeler que le prospect fût révéler par son contraire le perspect? Comme les oeuvres in-situe du Land Art qui donne à voir sans se montrer elles-mêmes, mais qui montrent ce qu'elles ne sont pas, la nature, en la marquant; le site, alliance du paysage et de l'architecture, oblige à une inversion du regard. A l'intérieur des sites nous nous déplaçons dans un perspect a-visuel ou conceptuel qui nous renvoie au prospect absent. Le site montre ce qu'il n'est pas et dirige notre regard ailleurs. Pouvons-nous penser que derrière cette formule d'Anne CAUQUELIN se cache le don d'ubiquité permis par le réseau? Alors Internet? Utopie ou atopie? Son livre Le site et le paysage - collection Quadrige chez PUF-, dans la suite de L'invention du paysage répond à ces interrogations.
.............................LE PAYSAGE PANOPTIQUE D'INTERNET
Dans cette seconde partie nous retrouvons la question de l'hypothétique présence liée au site chez Anne CAUQUELIN, mais cette fois sous le signe de la surveillance mutuelle.
Jérôme GLICENSTEIN durant son exposé fera la démonstration que "la transition entrevue par DELEUZE, d'une société disciplinaire à une société de contrôle se réalise en fait justement en raison du fonctionnement utilitariste et panoptique qui se met en place sur le World Wide Web ". A la suite de Michel FOUCAULT, Jérôme GLICENSTEIN reprendra dans son étude les projets du philosophe anglais Jeremy BENTHAM (17481832) fondateur de l'utilitarisme qui repose sur l'idée que le but de la société doit être "le plus grand bonheur du plus grand nombre". Mais BENTHAM ne s'est pas contenté de concevoir "le panopticon cette prison circulaire où tous les prisonniers seraient observés simultanément sans savoir ni quand ni par qui"; il a aussi dans le souci de justice universelle et d'efficacité amélioré la langue juridique. Il est l'inventeur de 3 mots (et concepts): "exhaustivité", "déontologie" et "international". Des mots courants constamment employés à propos d'Internet. Par la suite, Jérôme GLICENSTEIN s'attachera à développer le parallélisme entre les projets de Jeremy BENTHAM liés à chacun de ces mots et les formes panoptiques et utilitaristes d'Internet: l'organisation exhaustive du savoir mondial, le repérage des individus sur Internet et la constitution d'une communauté mondiale. De cette analyse, il découle que le contrôle continu et exhaustif qu'exerce Internet permet par intimidation ou peur de la loi d'intérioriser des contraintes par la même plus efficaces que celles que pourrait imposer une société disciplinaire. "Dans le paysage panoptique d'Internet, il n'y a au fond pas de spectateurs, mais tout au plus des observateurs -eux-mêmes observés- [...] Il n'y a pas non plus véritablement de 'spectacle' car, selon la formule de FOUCAULT, "nous ne sommes ni sur les gradins ni sur la scène mais dans la machine panoptique".
b) TEILHARD DE CHARDIN: la noosphère.
En complément de la pensée utilitariste de BENTHAM, Jérôme GLICENSTEIN développera en seconde partie de son exposé le concept de noosphère attaché àTEILHARD DE CHARDIN. Il s'attachera à montrer l'aspect fictif d'une telle entité proche de l'esprit absolu hégélien et ses prolongements dans l'idée d'un "cerveau mondial" mis en avant par les défenseurs d'Internet. Il rappellera les risques de dépersonnalisation et de collectivisation d'une communion universelle des pensées qui prône la mutation de l'humanité par le don de soi et l'ascétisme. La réalisation de cette utopie qui aboutit à la volonté de certains internautes d'en finir avec la vie privée, débouche sur le partage de la vie, le partage du fichier de l'ordinateur sur des sites comme "In my life sharing" ou "File sharing". Pour certains même, la simple utilisation d'activités ordinaires relayée par l'ordinateur, prolongement d'eux-mêmes, et par le réseau les porte à voir celui-ci comme une oeuvre d'art en soi.
.............................. REFERENCES Anne CAUQUELIN
invite les étudiants à étudier les référents et le langage des référents. Elle encourage les étudiants à s'entourer de référents personnels: batterie de concepts et de métaphores. "Plus la métaphore est folle, plus elle marche ". Sa dernière injonction: "chercher les bons référents pour penser Internet".Anne CAUQUELIN